COCO ROSIE / GREY OCEANS
J’ai attendu longtemps, très longtemps avant d’écouter Grey Oceans. Je
ne sais pas pourquoi, peut être parce qu’il faut du temps, une écoute particulière pour pénétrer dans Coco Rosie. Il ne s’agit jamais avec les sœurs Sierre & Bianca, de caler un fond sonore
confortable sur le lecteur Ipod. Il s’agit plutôt d’être prête pour un voyage cotoyant souvent les frontières du bizarre. Et pour se laisser attraper
par la fantasmagorie de Coco Rosie, il faut y être disposée. Dans cet album plus de piano, d’harmonie instrumentale avec un beat hip hop toujours déconcertant au milieu d’accords lyriques. C’est
parfois too much, dissonant, agaçant cette voix infantile qui a l’air un peu forcée. Et pourtant, il y chez Coco Rosie tout un monde d’images et de rêveries dans lequel il est incroyablement bon
de se réfugier. Loin de la ville, de l’agressivité, de la modernité, dans un univers entre obsolète et étrangeté, magie et marginalité.
Comme dans un film de David Lynch, on ne comprend pas tout au chemin
que Coco Rosie veut nous faire prendre mais on a terriblement envie d’y aller les yeux fermés en acceptant de s’abandonner à l’incompréhensible mais absolument sensible. Quand j’écoute Bachelorette de Bjork je suis dans un train lancé à toute vitesse qui m’emmène vers les neiges islandaises, quand j’écoute Coco Rosie, j’ai 10
ans et je chevauche la monture d’un manège aux mille couleurs qui tourne inlassablement… Comme si le réel n’était plus qu’un décor à des milliers de projections insensées qui s’évaporent dans le
ciel que je regarde droit dans le bleu avec mes 20 ans supplémentaires.
LILLY
WOOD & THE PRICK / INVINCIBLE FRIENDS
Si Duffy avait commis l’interdit avec Cœur de Pirate, ça aurait pu donner Lilly Wood &
the Prick. En termes de timbre de voix…. Et si je ne suis fan d’aucune de ces deux chanteuses, j’ai plutôt plaisir à écouter Nili Hadida, la voix un peu brisée et un peu nasillarde de Lilly Wood & the
Prick.
Je ne vais pas crier au génie mais je vais dire haut et fort le plaisir d’un album bien ficelé, précis, propre, efficace. Sans brisure ni grandiloquence, sans arrangements
délirants ni balades envoûtantes, Lilly Wood & The Prick remplit parfaitement son rôle d’album pop folk rafraîchissant. Un vrai joli moment d’émotion toutefois avec Prayer in C, un morceau
épuré assez vibrant qui laisse percer entre flûte et guitare sèche, cette jolie voix cassée un peu bluesy qui fait la poésie de cet album. Contrebalancé par l’inattendu No No ( Kids), hymne
caustique à l’anti-maternité et au refus de la propriété... Oui à 24 ans on a encore le droit de croire et de chanter qu’on va y résister et en faire
une bonne chanson.
BRISA ROCHE / ALL RIGHT NOW
Le problème quand je suis déçue c’est que j’ai mille formules débiles qui me viennent en tête pour ne pas me laisser aller à la violence pure de mon désarroi… ! En
l’occurrence avec un nom pareil, j’aurais eu envie de vous tenter un « Roché me les brise… » ou « Brisa Roché… oui enfin ça casse pas des briques… » Bref, de la haute voltige.
Cela dit pour être juste, ce serait tout de même un peu fort.
Oui je suis un peu déçue car avec un aussi joli pseudo mais surtout un aussi beau visage, aussi lumineux qu’une matinée d’hiver ensoleillée, on n’a pas le droit de laisser
perplexe. Et le problème c’est que Brisa, j’avoue j’ai eu envie de l’éjecter de la platine à un moment
donné sans trop savoir pourquoi. Peut être parce qu’on ne m’avait pas prévenue qu’il fallait respecter une posologie très espacée pour suivre ce
traitement… J’ai voulu m’ingurgiter tout le tube d’un coup et ça a finit par faire trop.
C’est peut être que les bonnes choses sont à consommer avec modération. Et je reconnais volontiers que Stone Trade par exemple, se
laisse tout à fait écouter et réécouter, mais dans un tout de voix hétéroclites alors. C’est peut être aussi le problème d’avoir un timbre très particulier, un peu atypique , c’est à double
tranchant. Ca a la grâce d’une identité forte et personnelle, mais c’est parfois tellement fort que ça écrase tout le reste. Et si Brisa fait de très
jolies choses avec sa voix, en passant par tous les octaves, c’est cette même voix qui parfois cannibalise des mélodies et un rythmique plutôt bien calées je trouve.
AGNES OBEL
NDLR: Et en attendant de vous parler de son album en entier, je vous invite à vous régaler de ce qui est définitivement une
excellente découverte, Agnès Obel, signée chez le très bon label PIAS.... Dans la veine des belles à piano Tori Amos, Cat Power, Fiona Apple, elle a la grâce écrite dans la douceur de ses traits,
l'émotion lisible dans la pureté de ses yeux et la sensibilité à fleurs de doigts. Un bonheur exquis, plein de délicatesse et de subtilités, qui étreint le coeur avec une tendre
mélancolie absolument délicieuse.