LES NOUVELLES STARS DE LA FRINGUE

12 novembre 2004 : il faut combler l’abysse de consommation entre Halloween et Noël. Brillant stratège du marketing, le géant de la mode grand public H&M, bien connu pour son stylisme tendance à petits prix, consacre ce jour-là sa suprématie sur le marché du vêtement, par une collaboration inespérée.

Karl Lagerfeld, la figure de proue de la scène mode se lance dans l’aventure altruiste de la démocratisation du vêtement haut de gamme. Exit le luxe élitiste.

Bilan : aux détours des magasins de la marque, et particulièrement à Paris, une horde de fanatiques s’amasse pour être sûre d’acquérir l’objet d’un désir attisé par d’habiles campagnes publicitaires elliptiques.

Au final pour H&M, un véritable succès commercial et l’amorce d’un phénomène structurel du milieu. Une brèche dans laquelle s’engouffrent depuis, et chaque année en nombre croissant, enseignes, créateurs et vip.

Pour la rentrée 2007, Tex (la branche mode de Carrefour) reçoit le franco-américain chouchou des stars Max Azria, André s’offre Michel Vivien après le succès remarqué des Prairies de Paris, tandis que France Arno s’enorgueillit de son binôme avec le très moderne Gaspard Yurkievich. Mais c’est Gap qui remporte la palme avec une micro-collection de chaussures dessinée par Pierre Hardy. Après sa collaboration avec la cultissime Carrie Bradshaw, alias Sarah Jessica Parker, le roi du casual wear prouve qu’il sait parfaitement s’entourer.

C’est le paradis pour des femmes à l’affût d’une mode qui semble affirmer, par sa seule étiquette griffée, un style irréprochable.

Outre l’incontournable Monsieur Chanel, les stylistes successifs qui se prêtent au jeu des collaborations ne peuvent pas tous revendiquer la même renommée grand public.

Chez H&M toujours, Stella Mc Cartney s’appuie sur son patronyme pour rassembler les foules. Certains designers très connus déclinent encore l’invitation : snobisme, distinction ?... Ce sont donc les plus « underground », et pour le moins talentueux, Viktor & Rolf qui s’y collent l’année suivante et cèdent leur place pour le cru 2007 à l’ostentation assumée de Roberto Cavalli : au programme du léopard, du zébré, des paillettes … de quoi en mettre plein la vue aux clients du suédois de la mode au moment de fêtes.

On cultive le souci du détail : cintres nominatifs, shopping bags significatifs de l’achat, échantillons de produits dérivés. Les rouages d’une industrie à la recherche d’adeptes fidélisés se mettent ici en route.

L’alternative gagnante est la suivante : pour les enseignes hôtesses, dynamiser leur marque, la rajeunir par ces collaborations audacieuses, proposer du luxe à une clientèle avide de marques. Pour les créateurs, promouvoir leurs collections en nom propre par le biais de ce vecteur grand public, initier un nouveau pouvoir d’achat.

Comble du phénomène : aux caisses des acheteuses aisées se battent pour ce luxe à bas prix. Une centaine de pièces pour une veste à paillettes de Karl Lagerfeld en France, c’est assez d’exception pour faire frémir les plus comblées d’entre nous !

Au départ de cet engouement consensuel pour la mode et ses acteurs, il y a eu la starification de ceux qui l’incarnent.

Véritable antichambre des tendances urbaines, les défilés propulsent les mannequins au rang d’idoles dans les années 90. C’est l’avènement des top models (Cindy Crawford, Claudia Schiffer, Naomi Campbell) et de leurs consoeurs, actrices, qui vont devenir les égéries des plus grandes marques de luxe.

La peopolisation est sur tout les fronts : médias, art et dorénavant mode.

Depuis Nicole Kidman pour Chanel, Scarlett Johansson pour Vuitton, Sharon Stone pour Dior, les icônes du cinéma et de la musique ont pris d’assaut ce nouveau monde à conquérir.

Mango édite les créations de Milla Jovovich et renouvelle cette année avec Penelope Cruz, emblème hispanique du glamour, taillé sur mesure pour la marque ibérique. H&M persiste et signe avec la collection de Madonna. Moins légendaire que son œuvre musicale, elle se trouve reléguée aux portants des soldes faute d’avoir été écoulée comme il se doit… Top Shop, l’alter ego de H&M outre manche, culmine avec une Kate Moss plébiscitée par la presse et les fans.

Lancel remplace cette année Laure Manaudou par l’ultra hype djette Cécile Togni et opte pour un lancement de ses créations en avant première dans le temple de la mode, Colette. La grungette chic Lou Douillon appose sa touche glam rock au légendaire Lee Cooper.

La Redoute l’avait déjà choisie cet hiver pour sélectionner  avec sa mère Jane Birkin les must have de la VPC. La catalogue avait tôt flairé le succès de ce type d’associations et comptait parmi ses fidèles des pointures de la mode tels que Christian Lacroix, Jean Paul Gaultier,….

Certaines des stars acoquinées à la mode s’émancipent.

Evénements de cette rentrée inspirés par la british touch : Twenty8Twelve, la ligne bobo de Sienna Miller et de sa sœur, The Row, fruit de la créativité de la fratrie Olsen ou la collection punk girly de la très pointue Chloë Sevigny.

Les points de vente sont, pour le coup, triés sur le volet (Montaigne Market, Bon Marché…) pour une image de marque qualitative.

Les collaborations se suivent et ne se ressemblent pas toujours. Heureusement. Mais à l’unanimité les stars sont vouées à le devenir encore plus car la mode en redemande.