L’attachée de presse aime le name dropping, faire du shopping, participer à la semaine du fooding, aller se faire le soir un footing, se prendre pour Catherine Baba et dire que c’est « amaaaazing daaaarling », envoyer des e mailings, se coller à son phoning. Elle aime faire des choses en –ing, des choses tellement moins boring…
L’attachée de presse pige les magazines. Mais pas qu’au bureau. En vacances aux Bahamas, à Courch’ en bas d’une piste, ou à Palavas mais pas au camping, partout l’attachée presse traque la parution. Son sac baluchon dans le Elle, sa paire de baskets dans le Grazia, son top à paillettes dans le Glamour. Les maisons de la presse sont des refuges, des repères rassurants où il fait bon compulser les journaux, pousser des haaaaa, des yesss, des ouiiii en découvrant ce qu’elle sait pourtant qu’elle va forcément y trouver. Car l’attachée de presse sait où et quand aura lieu sa parution. Mais même l’autre bout du monde, les vacances, l’être aimé, les enfants, les amis ne la détourneront du droit chemin. Celui qui mène à la parution, le produit de son client marqué à l’encre indélébile sur le papier glacé. Amen.
L’attachée de presse ne connaît pas les soldes. Elle connaît les ventes privées, les ventes presse, les ventes à domicile, les promotions spéciales. Elle reçoit 50 mails en novembre et en mai, 20 cartons d’invitations en parallèle pour acheter à prix réduits ce que les autres payent le plus souvent à prix forts. Injustice, favoritisme ? L’attachée de presse n’a que faire de l’équilibre des forces lorsqu’elle en phase d’achat. Rien ni personne ne l’empêchera de faire son heure de queue pour rentrer chez Louboutin en ventes presse, de traverser Paris à l’heure du dej’ pour aller chez la Marant, de cramer toutes ses économies en moins d’une demie heure dans les boutiques de quartier qui font des ristournes avant l’heure. Du coup l’attachée presse trouve inadmissible que sa salade lui coûte 5 euros au super marché alors qu’elle vient d’en dépenser seulement 200 dans un sac de marque qui en valait pourtant 700 au départ. Monde cruel.
L’attachée de presse connaît des maquilleurs, des mannequins, des coiffeurs, des réalisateurs, des graphistes, des photographes, des designers, des webmasters, des D.A, des journalistes, des stylistes, des comédiens, des chanteuses, des djs, des traiteurs, des scénographes, des videurs, des vendeuses, des serveurs, des créateurs, des communiquants, des marketeux... Simplement parce qu’au moins une fois dans sa carrière elle a du organiser un dîner pour un client suivi d’une fête avec beaucoup de monde. Et que maintenant tous ces braves gens sont devenus ses amis facebook et linked-in pour l’éternité. L’attachée de presse a un carnet d’adresses qui finalement est un peu comme une grande famille virtuelle.
L’attachée de presse dit « tu » à tout le monde. Elle t’appelle par ton prénom, n’a pas dit monsieur/madame depuis autant d’années qu’elle fait ce métier. Du coup l’attachée de presse s’emmêle les pinceaux : elle dit Martine à sa banquière pensant créer un lien indéfectible avec celle qui a droit de vie et de mort sur ses futurs escarpins Prada, Robert au dentiste croyant que c’est plus prudent d’ établir une familiarité avec son dentiste qui a des armes de destruction massive dans sa bouche. Du coup quand tu vouvoies l’attachée de presse, elle se braque, se formalise, pense qu’on la vieillit, que c’est ringard cette distance condescendante.
L’attachée de presse aime le relationnel, l’affectif, les gens. Elle appelle ses collègues chouchou, chéri, chaton, pour leur dire plus joliment que la prochaine fois qu’ils lui piquent un rv avec une redac chef majeure, elle va leur faire un kick arrière en pleine présentation client. L’attachée de presse dit, bichette, poulette, minette pour signifier que si jamais tu lui clepto’ encore son Madame Figaro, faudra pas te demander pourquoi ton ordi a attrapé un virus qui a flingué tout ton dossier bilan 2011. L’attachée de presse est diplomate, fair play, souriante, partante, patiente. Elle a simplement un langage à double sens.
L’attachée de presse a deux amis : son I phone et le chargeur de son I phone. L’outil de survie, la raison d’être, le binôme sans lequel, d’attachée de presse il n’y a plus. Elle a appris à écrire avec 2 pouces et dans le noir, des mails qu’elle envoie même à 1h du matin histoire d’en avoir un de moins à consulter le demain matin. Car l’attachée de presse n’est pas la seule à penser la nuit : le matin à 10h elle a autant de mail que le Vogue a de réponses positives à une invitation à sa soirée d’anniversaire en 2 jours. Du coup l’attachée de presse semble entretenir une relation fusionnelle avec son mini ordi de poche. Un amour que les autres ne comprennent pas vraiment. Une frénésie extatique qui donne presque le sentiment qu’elle aime ça recevoir 15 mails/minute, 3 appels par heure même en dehors du service minimum. L’attachée de presse envoie des textos depuis son bain, prend des notes pour sa stratégie de com’ aux toilettes, balance des mails entre l’apéro et l’entrée sans que personne ne comprenne d’où lui vient cette envie soudaine. L’attachée de presse aime son I phone comme d’autres aiment leur chien. Avec ferveur, respect et tendresse.
L’attachée de presse a un langage bien à elle. Des abréviations par dizaines sensées faire gagner du temps à qui a le génie du déchiffrage: VTAC (je vous tiens au courant) ou ses variantes TTAC, NTAC, elle envoie des YSI (you send it), fait des mails FYI (pour votre information, en français), convoque la presse B to B… Parfois aussi, elle est au BDR (bout du rouleau) ou résume clairement sa journée difficile par un expéditif VDM (vie de merde). Bref l’attachée de presse a du vocabulaire, un lexique riche en rebondissements, en mystères insondables qui lui permet de coder des messages dont l’objectif est simple : faire péter le score des EAE (équivalents d’achat d’espace). Autrement dit faire gagner(économiser) beaucoup d’argent à son client. Une mission assez claire en somme.
Bref, l’attachée de presse est une femme comme les autres. Parfois d’ailleurs, l’attaché de presse est un homme comme les autres femmes. Mais c’est encore une autre histoire.
Toute ressemblance avec des personnages existants ne serait évidemment pas fortuite.