"Thus far my life has been wonderful"....
De l’autre côté de l’Atlantique, à l’opposé de l’Amérique, aujourd’hui, on m’a écrit cette si jolie phrase, qui n’est probablement que le début d’une belle histoire. La sienne. Et celle d’une rencontre inattendue, absolument improbable. Celle d’un face à face écrit avec mon double au masculin. Un jumeau de sons, de mots, de caractère, de goûts, d'images... Une histoire que je vais écrire comme mon premier vrai rendez-vous avec les autres. Car de m’être racontée autant, d’avoir mis tant de mots sur moi, tant d’images sur mon quotidien, n’a fait qu’amplifier l’envie des autres, le besoin de leurs différences ou de leurs similitudes, le désir de les dire. Le blog a fait naître le sentiment d’avoir fait le tour de soi et de ne pouvoir maintenant en apprendre plus, qu’en laissant les autres se livrer. Et dans cette attente apparemment illusoire, avec ce projet d’écriture en tête qui ne trouvait pas son premier souffle, l’évidence a pris forme sous les traits de celui que j’aurais pu être si j’étais née de l’autre côté de l’Océan… Entre curiosité insatiable et frénésie d’écriture, je redécouvre le plaisir de lire et d’écrire autre chose que moi. Mais qui en l’occurrence me ressemble tellement, que j’ai déjà le sentiment d’être en train d’en apprendre bien plus que ne l’a permis le miroir de mes mots jusqu’alors.
Un blog n’est pas un outil pour parler de soi, c’est un moyen de parler aux autres. Et si j’aime infiniment savoir que j’écris enfin pour être lue, l’envie de lire pour pouvoir écrire me taraude encore plus...
Nous ne sommes pas qui nous montrons. Ni les photos que nous choisissons, ni les tenues que nous portons, ni la musique que nous écoutons. Nous sommes vraiment nous dans le secret de nos rêves, dans l’intimité de nos passions, dans l’apprentissage de nos goûts spontanés, dans la construction de notre univers personnel, dans la discrétion de nos amours, dans la vérité de nos paroles orales. Nous sommes ici une projection idéale de ce que nous acceptons de mettre à nu. Qui verra les photos de moi qui dissoneraient sur ce blog, qui lira les textes interminables que j’égraine sur mon clavier nocturne, qui ressentira les chansons que je murmure parfois au dessus d’un piano ou à l’oreille de mon amoureux, qui verra les clichés banals que j’ai pris et qui racontent pourtant ma vie, qui saura vraiment qui se cache derrière de faux cheveux blonds, derrière le masque d’un maquillage, d’une mise en scène... Qui voudrait ? Qui est-ce que ça intéresserait ? Pourquoi vouloir le montrer alors qu’il importe seulement que nous sachions véritablement qui nous sommes nous-mêmes. Il y a dans la part d’imaginaire ou dans le contrôle du visible, l’essentiel de ce qui convient à un blog.
Des bribes de chacun par procuration, des idées à adapter, des inspirations à critiquer, des découvertes à faire. Mais c’est exactement dans tout ce qui n’est pas dit, ni montré, c’est tout à fait dans ce qui est vécu en dehors, que réside le vrai. Nous sommes sur un blog et je suis un personnage. Ce que vous voyez n’est pas faux, c’est absolument partiel.
Et c’est dans les interstices, dans les brèches qui s’ouvrent entre chaque post publié ici, que se situe le réel. C’est aussi dans les autres, dans leur histoire, dans leur vécu que résident les pièces qui manquent à mon puzzle. Il me tarde maintenant de les écrire eux, comme j’ai pu m’écrire moi.
A trop se dire, on finit seulement par se justifier, à trop se montrer on finit seulement par lasser, à trop exprimer on finit par ne plus ressentir. J’aime le mystère, j’aime la suggestion, l’élégance d’un abandon impudique. Je ne crois pas que le blog soit le lieu idéal pour ça… Même s'il a été le lieu parfait pour arriver à cette conclusion essentielle.
Je ne sais pas vous, mais moi j’ai cette obsession tenace qui consiste à vouloir préserver les belles choses, à veiller toujours à ne pas finir par les abîmer... Et parfois pour y parvenir, il faut ne plus rien toucher, ne plus rien changer, il faut parfois même abdiquer.