En ce moment je suis, comme qui dirait, pas bien câblée. Alternante, déphasée, tantôt fofolle, tantôt tristoune. Maniaco-dépressive diront les plus défaitistes, en rémission dirais-je pleine d’espoir !
J’ai comme le sentiment que les 3 paires de pompes que je me suis enfilée ce mois-ci, y sont aussi pour quelque chose. C’est comme si mon état d’esprit suivait le leur à la trace. Vous voyez bien que ça tourne pas rond… Déjà parce que trois paires de chaussures en un mois, c’est au moins deux de trop, ensuite parce que je devrais peut -être m’inquiéter que mon humeur devienne tributaire des chaussures que je porte. M’en fous, en cas de pénurie de sentiments, bonheur, réjouissances, la chaussure c’est encore le moyen féminin le plus adapté de se faire du bien là où ça fait mal.
D’une parce que ça ne sert à rien et ça, ça génère toujours un plaisir énorme, ensuite parce que ça renouvelle. En cas de besoin de renouveau, changement, c’est toujours mieux qu’une teinture rousse que je pourrais regretter nettement plus qu’un compte à découvert (si, si j’y ai songé sérieusement pendant 24h, c’est pour dire à quoi je suis réduite… !!).
Ca a commencé avec une paire de sneakers. J’étais tombée amoureuse d’un modèle tout à fait voyant et massif
et je me suis retrouvée avec un modèle tout à fait fin et discret. Normal quoi. La contradiction dans toute sa splendeur, ou comment se pâmer quinze jours devant une paire de chaussures, clamer
que ce sera celle-ci et aucune autre, pour finalement changer d’avis en 2 secondes 30. Mission dominicale accomplie : j’ai pris mon meilleur ami sous le bras, ou presque, et je l’ai traîné
sur les Champs- territoire si agréable par temps de week-end- pour assouvir mon besoin incontrôlable.
Une fois le modèle Scandal de Nike validé par l’expert en la matière, j’ai donc fait résonner le tiroir caisse, d'un coup de CB magique. Ce petit engin fantastique qui claque des fortunes sans en avoir l’air…Alors qu’est ce qu’elles nous disent ses jolies baskets de fiiillles ? Et bien qu’on en a ras le bol de se traîner en talons quand on a le dos flingué et qu’on veut briller un peu quand même en paillettes et vernis, parce qu’on en reste pas moins une fille. Depuis je trace plus vite que Bioman dans les couloirs du métro, je me la pète street et j’écoute NTM pour aller au boulot, comme si porter des baskets faisait de moi une caillera alors que suis toujours une modeuse déguisée en meuf cool. Bullshits. J’aime bien m’inventer une vie.
Ensuite il y a eu le syndrome "post coup de foudre' = achat impulsif. Présentation pour un client,
journalistes de mode par dizaine et là, merveille, l’une d’entre elles, portent aux pieds des sandalettes cloutées à tomber, et ce, par 5 degrés. Bluffée par le courage vestimentaire incroyable
de la demoiselle, je m’empresse de lui voler la marque de ses tatanes de ouf pour faire tout comme elle, en collant noir et même tout en look noir d’ailleurs, parce que ça flashe ces clous
argentés sur du black.
Direction New Look avec une seule idée en tête. De toute façon pas moyen de dévier du droit chemin, parce que tout ce qui se passe alentours, se passe de commentaires… Miracle de la vie : le modèle, une paire, une taille, la mienne. La vie apporte parfois des réponses tellement évidentes à des questions tellement cruciales… Du genre Balmain à 40 euros, et mini talons, même pas trop laids pour une fois, c’est tout ce que je demandais. Oui, j’ai revu quelques exigences à la baisse, certes. Quand je les chausse pour la première fois, je me sens un peu comme Cendrillon dans sa pantoufle de vair version sexy rock 2009. Je minaude. Je me sens fille, femme, que sais-je, je cliquète sur le pavé en écoutant The Unforgiven, Black Album de Metallica de circonstance, pour flash back dans les années 90 qui bercèrent ma jeunesse. James Hetfield, ta voix rauque et ténébreuse me fait grrrrr dans le corps, j’avais oublié cette chape d’obscurité fascinante quand je t’écoute. Folle, oui folle. Le soir, je les range dans mon placard à côté des escarpins à clous, ballerines à clous, boots à clous… Prise de conscience simultanée de certaines affinités en la matière. Il va falloir me sevrer. Celle-ci sera la dernière paire à clous…. Avant la prochaine….
Et puis il y a eu l’épopée britannique. Un ancien coup de foudre qui s’est renouvelé il y a quelques mois de
cela. En allant chez Vivienne Westwood pour travailler à choisir des vêtements pour une boutique (trop dur la vie d’attachée de presse…), il y avait une fille avec des bottes de la marque, que
j’avais rangées dans ma mémoire pour cause de frustration certaine à l’arrivée. La question fatidique tombe. Réponse : elles existent encore. Les pirates de leur petit nom. Rien que
cela me fait frémir de bonheur. Folle, oui je l’ai déjà dit.
Donc direction les Galeries Lafayette où elles n’existent pas en noir….Enfer, damnation. Rien à foutre, Londres n’a qu’à bien se tenir. Branle-bas de combat, tous mes contacts anglais sont harcelés de messages pour aller acquérir pour moi au flagship store de la marque, le graal et sauver ma santé mentale du même coup. Trois mois d’économies sages pour pouvoir les acquérir, avec une petite ristourne négociée à l’occasion de mon anniv, ce sont trois mois de désir qui monte, qui monte, qui monte… Et finalement un paquet Fedex envoyé en 48H from London. Et là, ouverture du colis tant attendu, surprise, « tiens les sangles sont beiges au lieu d’être marrons, tiens le 40 anglais taille comme du 42 … », mais, sourire béat tout de même en enfilant les fameuses boots enviées sur tellement de pieds depuis tellement d’années. Puis, grand jeu : lanières superposées, enfilées à l’arrache avec boucles pas bouclées. Le punk made in Vivienne s’empare de moi. J’ai envie de péter la gueule au mec qui me lâche la porte au nez dès le lundi matin dans le métro, je tire la tronche comme tout le monde sauf que je le fais avec un air encore plus très très méchant, et je trace la mine gravissime sur fond de Prodigy décadent. Smack my bitch up… Fuckin’ good idea…
Alors tout ça pour ça me direz-vous ? Et bien oui. Parce que sinon des chaussures comme ça, sans histoire, sans décor, sans contexte, c’est très joli… Mais c’est chiant.